Non, les Kabyles n’ont pas tué le jeune Djamel

La Kabylie en proie à des incendies criminels, août 2021.

La Kabylie en proie à des incendies criminels, août 2021.

 

Le cynisme de la junte militaire au pouvoir en Algérie n’a pas de limites dans la provocation et ses tentatives de mettre à genoux la Kabylie qui lui résiste. Ils nous brûlent vifs, incendient nos foyers, nos oliveraies… Ils frappent fort en n’épargnant rien ni personne. Alors que le monde entier nous plaint, devant l’ampleur de la tragédie que nous subissons, voilà qu’ils vont encore plus loin dans leur barbarie.

Ils assassinent le jeune Djamel qui venait de Khemis Miliana (l’Ouest du pays) en aide à la population locale de Larba Nat Iraten, en proie aux flammes qui dévorent leurs maisons, leurs villes et villages, leurs champs… Au passage, je m’incline à la mémoire de Djamel qui est tout aussi victime que ceux qui ont perdu la vie dans les incendies instigués par les mêmes criminels. À la lumière des vidéos et des recoupements qui circulent sur les réseaux sociaux, on comprend vite que la ficelle est un peu grosse. La police avait livré un cadavre (un corps inerte) à une population chauffée à blanc par la manipulation. Le groupe réduit, et encadré par des « éléments louches », donnaient des coups de pied, par moments  hésitants, sur un corps qui ne bougeait pas. Et encore, le plus déconcertant, tout se passait sous les yeux de la police, à quelques mètres près de leur fourgon d’où il était sorti déjà mort. La même police qui est venue de son propre chef pour le livrer à la foule ! La scène est on ne peut plus surréaliste. Oublions un peu la mise en scène : pourquoi ne l’avaient-ils pas protégé alors qu’il était sous leur protection ? Que peut-on comprendre de tout cela ? Machiavélisme, quand tu nous tiens !

On a fait de la Kabylie, ces jours-ci, un enfer en y allumant des feux tellement gigantesques qu’ils sont visibles aux satellites. En d’autres termes, ils croyaient pouvoir « étouffer » leurs feux criminels de Kabylie dans le sillage des autres feux tout aussi gigantesques, mais d’une autre nature, que sont les incendies déclarés un peu partout dans le monde. Notamment le monde méditerranéen qui nous est voisin, l’Italie, la Turquie, la Grèce… C’était une « aubaine » pour eux. N’oublions pas que les incendies criminels et systématiques en Kabylie ne datent pas d’aujourd’hui. Les dernières trente années, au moins, il n’y a pas d’été où on n’avait pas mis de feu à nos montagnes, nos champs… Des feux qui finissaient souvent en drames humains, quand ils atteignaient les habitations. Ils faisaient à chaque fois de la Kabylie un enfer, même si celui-ci n’atteignait pas  de telles proportions. Peut-être que l’occasion ne s’y était pas prêtée comme cette année.

Je reviens à la victime expiatoire que fut le jeune Djamel. Personnellement, je pense à une intention ou tentative de « substitution [altération] de visibilité ». Ils voulaient substituer (ou altérer) la « visibilité » de leurs incendies criminels en Kabylie qui échapperait à leur contrôle par une autre « visibilité » tout aussi monstrueuse. Je veux dire qu’ils veulent confondre l’opinion avec la diversion, nous faire passer pour « coupables » de leurs propres crimes. Et au lieu de continuer à nous focaliser sur les tenants et les aboutissants des incendies dévastateurs provoqués par eux, surtout aux yeux de l’opinion nationale et internationale, ils veulent que nous passions notre temps à nous justifier continuellement pour des choses que nous n’avons pas faites. Pour nous faire « oublier » que nous sommes leurs victimes, ils nous sortent un cadavre de leur placard pour nous faire endosser le crime. Une arme perfide à double tranchant. La preuve, après la malheureuse mise en scène, nous nous trouvons confrontés à un « trouble de vision », de perception. Ils nous brûlent vifs, ils incendient nos maisons et nos montagnes, et nous nous demandons si nous ne serions pas coupables de ce qui nous arrive. C’est l’éternel sentiment de culpabilité que l’on nous a inoculé, et qu’on est tenus à chaque fois à nous disculper du crime que nous n’avons pas commis. Autant dire que c’est le monde à l’envers.

Non, les Kabyles n’ont pas tué le jeune Djamel. Cela ne va pas avec nos valeurs. Djamel est victime des mêmes criminels qui ont fait de la Kabylie un enfer. Nous n’avons pas les mêmes valeurs pour la simple raison que nous ne voudrions pas ressembler à ceux qui veulent nous exterminer. Répondre au crime par le crime ne va simplement pas avec nous.

M. Z.-K.

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